Cet édifice en ciment érigé en 1948 à Bellevue sur la N7, symbolise la frontière séparant l’île. Il commémore la cohabitation pacifique entre les Français et les Hollandais, qui se partagèrent les lieux il y a 369 ans.
Remontons le fil de l’histoire
La Compagnie de Saint-Christophe créée en 1626 par le Cardinal de Richelieu, est remplacée le 12 Février 1635 par la Compagnie des îles d’Amérique (1635 /1649) à la demande de Pierre Belain d’Esnambuc et d’Urbain du Roissey. En 1651, les îles de Saint-Martin et de Saint-Barthélémy sont acquises par l’Ordre de Malte qui les conserve jusqu’en 1665. En 1624 des colons français cultivent sur la côte Est de Saint-Martin du tabac, tandis que des colons Hollandais débarqués sur l’île entre 1627 et 1634, y exploitent les salines. En 1631, les Hollandais bâtissent sur la presqu’île de Grand-Baie un fort qui deviendra le Fort Amsterdam. Attaqué en juin 1633 par les 55 vaisseaux d’une flotte espagnole et 1300 hommes, 250 soldats s’y installent puis se retirent en janvier 1648 suite au Traité de Münster, après l’avoir démantelé, car l’entretien du fort coûte plus de 100 000 écus par an ! Des colons Français établis au Sud-Est de l’île en 1638, cultivent manioc et canne à sucre. Français et Hollandais suite à ce départ avertissent leurs hiérarchies. Les renforts hollandais partis de Sainte -Eustache tentent de bloquer les renforts français composés d’une trentaine d’hommes arrivés depuis l’île de Saint-Christophe. Ils recevront l’appui de 300 hommes, menés par le Chevalier de Longvilliers neveu de de Poincy, lequel une fois jeté l’ancre face à l’île, envoie au Gouverneur Martin Thomas un ultimatum afin qu’il restitue leurs biens aux Français. Les Hollandais acceptent, ce qui entraine le partage de l’île.
A la force du mollet
D’après la légende locale, Français et Hollandais envoient leur meilleur athlète. Ceux-ci se donnent des forces avant le départ grâce aux boissons respectives de leurs nations : du genièvre pour le Hollandais, du vin pour le Français. La course débute à la baie d’Oyster Pond, on les place dos à dos pour parcourir l’île en sens contraire. On raconte que le français aurait couru plus vite que son concurrent ou qu’il emprunta un raccourci… gagnant ainsi plus de terrain pour sa nation. Suite à cette course sur l’île de 93 km2, une frontière de 10 km est établie : les Français occuperont 2/3 au nord de l’île, soit 4 quartiers : Marigot, Colombier, Grand Case, Orléans. Un bourg est bâti face à la plage de la Baie de Marigot et sur le morne on construit en 1776 le Fort Saint-Louis, où cantonnent cent soldats protégés par 18 canons. Les Hollandais s’établissent au sud-Ouest, sur un banc de sable, à Phillipsburg.
Le « Traité du Mont des Accords »
Le 23 mars 1648 un accord signé sur ce Mont par Robert de Longvilliers de Poincy, Gouverneur de Saint- Martin pour la partie française et par le Gouverneur Martin Thomas, entérine la double nationalité de l’île, son unité, la libre circulation des hommes et des biens- la frontière étant libre de passage- ainsi que l’entraide d’une nation envers l’autre si nécessaire : « les Français et Hollandais et alliés vivront comme amis». Saint-Martin est alors rattachée à Saint-Christophe. Dans cette île où l’on parle diverses langues, l’hymne bi-national est « O Sweet St Martin’s Land », composé en anglais en 1958, puis en Français (avec des mots différents), par le père Gérard Kemps, curé en 1954 de la paroisse en partie française. Le Père rendit un bel hommage à cette île si chère à son coeur.
Texte & photos : Angel St Benoit