Les Amérindiens arrivés en Guadeloupe en l’an 1000, cultivaient des terres à Baillif. Le 26 Janvier 1637, Charles Liénard de l’Olive cède aux Pères Dominicains des hectares sur la Montagne Saint-Louis. En 1654, une Ordonnance Royale donne la concession de l’eau aux habitants.
Les Dominicains
Technologiquement avancés, ils sont à l’origine de la commune où ils édifient une vingtaine de sucrotes et deux Habitations. Avant 1700, l’ingénieux Père Labat amène les roues à eau, fait creuser le canal de la Montagne Saint-Louis, captant l’eau très en hauteur, pour desservir les premières Habitations Sucreries. Autonomes, elles cultivent vivres, roucou, coton, indigo… Le Gouverneur Charles Houël oblige les Dominicains à vendre des terres et en 1732, les frères de Bourg, nommés ensuite Dubourg achètent au cinquième étage du Petit-Marigot une parcelle avec Habitation et sucrerie. Les religieux leurs intentent un procès car ils ont dévié l’eau de leur canal vers leur propriété. L’Habitation porte ensuite le nom des propriétaires Jean-Baptiste Massieux (1794) puis Dupuy Desislets. En1817, elle est renommée Bouvier du nom de famille de Jean-Jacques Bouvier.
La sucrerie
Près de l’entrée, ses murs en pierres de rivière enduites sont face à la balance et aux bouquets de bambous, dans lesquels on taillait autrefois des « roquilles » pour transporter le tafia de contrebande. Les premiers bâtiments datent de 1732, la sucrerie devient distillerie à la crise du sucre en 1895, où l’on surélève les colonnes, la cheminée, l’aqueduc. La roue à aube avec son arbre en fonte et en bois du Nord date de 1840 et tournera jusqu’en 1981. Ses godets, usés, sont restaurés entre 2003 et 2004. Majestueuse, elle fait 14 mètres de diamètre pour 22 tonnes. Son aqueduc doté d’une gouttière en bois prolonge un canal maçonné à la source. Doté d’un ingénieux système d’écluses, il alimentait autrefois la bonifierie et la manioquerie, situées avant l’Habitation.
La maison de Maitre
Datée de la fin du 18e siècle, de plain-pied avec vue mer, elle domine la distillerie. Bâtie en bois du Nord importé de Floride, elle est construite en fonction des alizés, des courants telluriques et la température y est constante. En 1826, elle est réparée, un vestibule est ajouté. De style créole traditionnel, son toit autrefois couvert d’essentes est surmonté de quatre lucarnes. La technique de montage est celle de la charpente de Marine chevillée, à tenons et mortaises, la sablière est assemblée en trait de Jupiter avec clé. Des escaliers en pierre mènent à une galerie soulignée de poteaux de bois entourant la maison. Reconstruite à maintes reprises, elle occupe le même emplacement depuis trois cent ans. Dans un bâtiment proche, en prévention des incendies, se trouvent la cuisine et l’office. Du temps de J.J Bouvier, les terres du jardin étaient soutenues par une muraille de 48.75 mètres, avec d’un côté un parc à vaches de l’autre un parc à veaux au centre un petit magasin, l’ensemble alors estimé 2000Francs.
La distillerie
Distillant le Rhum Dubreuil, depuis le temps d’ André- Louis Jouveau-Dubreuil, la chaudière de type Jamaïque, coiffée d’un chapiteau, jouxte deux barbotteurs en cuivre. L’alambic de type Privat et sa colonne à plateaux datent du début du XXe siècle. Il reste la grande cheminée, les colonnes à distiller, la salle de fermentation, la balance. Dans le chai situé dans l’ancienne sucrerie du début 18ème, reposent grosses cuves, tonneaux et bouteilles désormais vides. La distillerie ferme en 1981 au décès de Louis Jouveau-Dubreuil, grand-père de l’actuelle propriétaire ; laquelle oeuvre à la réhabilitation et à la conservation de Bouvier dans son âme et son authenticité.
Texte et photos : © Angel St-Benoit