Elle fait de son art un apprentissage permanent et de ses oeuvres des expressions mêlées et métisses de sa perception du monde, de ses traits intérieurs et de son amour à la terre.
Artiste tout en échange, elle capte du haut de ses milles connaissances plastiques, et nourrit ses techniques de ses rapports à l’autre.
Le sacerdoce d’une plasticienne
Discrète : voilà sans doute un caractère qui sied joyeusement à Odile Lanoix. Et pourtant, elle égaie depuis bien des ans déjà nos claies et érige l’art en mode de vie. La quarantaine heureuse, la jeune femme anime des ateliers, expose ses tableaux et fait de la peinture son sacerdoce, un métier à part entière. Il faut dire que la Martiniquaise autodidacte est une enfant de l’art. Elle s’épanouie au gré des ateliers dirigés par son père et se frotte à d´innombrables formes d’expressions. Elle s’essaie au dessin, modèle en poterie, marque en sérigraphie ou en pyrographie, capture finalement son monde dans les petites chambres de la photographie. Mais sa révélation, elle l’aura surtout en peinture, sous laquelle elle déploie sa plus grande inspiration.
Mais l’appel véritable et fondateur de l’art ne se fera que plus tard, alors qu’elle dépasse la trentaine. A cette période, sa sensibilité artistique sera mise au repos, le temps d’un passage dans une existence de bureau et de responsabilités. Elle se réveillera finalement au terme, dans une conscience nouvelle de ses besoins plastiques : le moment est arrivépour Odile d’être actrice de sa vie, et de s’épanouir pleinement dans l’art. Dès 2008, elle présente ses oeuvres et multiplie les expositions. Ses toiles voyagent, s’exportent, s’ouvrent, non seulement vers l’autre mais aussi au monde : on la croise dès lors aux Etats-Unis, au Canada ou en Europe.
« Chaque peinture est un voyage vers l’autre. »
La peintre polyforme est une force tranquille de caractère certes, modelée au talent et à l’inspiration, mais exigeante, elle n’en finit jamais d’expérimenter et de se former, à la recherche de nouvelles techniques, formes ou perspectives. Il ne sera alors guère surprenant de la croiser à l’école des Beaux-Art à Paris où elle étudie le dessin en 2012 ou au Petit Palais dans les années suivantes. Parce que pour Odile, être inspirée ne suffit pas, pas plus qu’une peinture technicienne ou l’âme ne se déverse pas, car il n’est pas d’oeuvre sans la trilogie créatrice de inspiration du monde, de l’âme vagabonde et de la technique en héritage. Et dans cette extériorisation enfin libérée, l’artiste trouve son fondement : « Ma liberté commence là où il n’y a plus de gêne dans l’expression de mon art. Chaque toile peinte me libère un peu plus de mes chaines ».
Une peinture en ode, en prière à la terre
Odile est une plasticienne de la contemplation, qui conçoit son art dans l’observation : de la terre comme un tout qui l’habite, des voyages et des rencontres qui se meuvent et s’enroulent en infinies inspirations. Elle pose ses émotions, sa perception du monde dans ses oeuvres et dévoile son invisible, comme catalyseur et révélateur. C’est dans l’abstraction qu’elle s’évoque, portée par la rigoureuse acrylique ou un mariage de techniques et de supports. Curieuse, elle valorise la recherche et l’expérimentation, jouant de la couleur et de la matière. Dans la forme, elle forme ses codes : le cercle est une constante, une omniprésence de ses toiles. Unité, équilibre infini, il n’est ni commencement ni fin, mais donne aussi à voir le groupe plus largement, l’humanité et ses forces vives. Il faut dire que ses intérêts se portent vers l’autre : elle apprécie l’échange, et y trouve de nouvelles inspirations. À l’hôtel de Région, au Palais des Congrès de Madiana ou dans les galeries d’art, ces collaborations artistiques prennent tout leur sens et continuent d’appuyer et d’enrichir son cheminement personnel.
Texte & Photos : CORINNE DAUNAR