Le carnaval est l’aura des sociétés créoles. Il ébroue les rues enflammées par ses couleurs, ses musiques, ses danses ou ses excès. Mais plus encore, il est une source d’inspiration pour nos plus grands écrivains.
Cette année de 1895, Louis Garaud, vice-recteur de la Martinique, se sent une âme de chroniqueur. Dans son fantastique carnet de voyage « Trois Ans à la Martinique » il nous conte son attachement pour l’île et ses habitants. Tout naturellement il explore les traditions martiniquaises, s’attache au carnaval et dépeint avec minutie les nuits extatiques d’un Petit Paris (ou Saint-Pierre d’avant) endiablé.
Quelque temps plus tard, dans les années vingt, la romantique Clémence de Linval, issue d’une très ancienne lignée Pierrotine, utilise les mots et le pseudonyme de Jean Max pour narrer sa ville natale. Dans son roman « Cœurs Martiniquais » elle chante sa vieille cité et évoque son ultime mascarade lorsque le sable de Saint Pierre était encore blanc…
À cette même époque, Lafcadio Hearn, journaliste au Harper’s magazine de New York, s’embarque pour une série d’articles aux petites Antilles. Curieux de tout et en observateur minutieux, il immortalise sous son pinceau d’aquarelliste le Saint-Pierre d’antan, Dans ses “Esquisses Martiniquaises”, il croque l’envoutante « Guiablesse » (ou diablesse), avec une telle précision que l’on jurerait qu’il l’aurait croisée… Il ignore que, spécifique à la Martinique, elle sera bientôt l’un des personnages emblématiques de nos carnavals Foyalais.
Vaval succède à vaval et inspire Raphaël Tardon, brillant écrivain et farouche adversaire de la négritude. Nous sommes en 1948. Dans son Roman “La Caldéira”, il nous livre la candeur des petites annonces éditées dans les journaux pour claironner les derniers bals du carnaval.
Puis les années s’écoulent. Saint-Pierre est avalé par la montagne. Une page est tournée, un siècle passé. Le carnaval est désormais le jouet des foyalais et continue de faire couler l’encre.
En 2007 c’est à Joby Bernabé, diseur, comédien et chercheur, de se placer en observateur. Dans Démaré, recueil de textes choisis et de poésies partagées, il nous transporte dans un univers où le monde est tout inversé et les « belles figures aigries sur les planches des jours cotillon tête en bas font leur Carnaval à l’envers. »
Alors que pour Marie-Line Ampigny, journaliste, écrivain possédant un cœur gros comme un chadeck, les plus jeunes ont eux aussi leur roi. Dans « Le Carnaval de Clémenceau Bwabwa», un conte pour enfants, l’auteur narre avec humour les avatars de Clémenceau Forceps devenu Clémenceau Bwabwa, le vaval de la commune de Saint-Vinvin…
Texte : Corinne Daunar
Photos : © Lois Hayot
Remerciement à la fondation Clément